La fourbure : La comprendre pour mieux la prévenir

La fourbure : La comprendre pour mieux la prévenir

Cet article vous est proposé par le vétérinaire Agathe Delobel.

 

 

 

La fourbure est une maladie grave. Elle est très souvent liée à des causes alimentaires, et notamment à une surconsommation d'herbe riche au printemps. Dans certaines régions toutefois, on rencontre d'ailleurs autant de cas de fourbure de prairie (ou même davantage) en automne.
La fourbure peut également avoir d'autres causes, et survenir notamment à la suite d'un poulinage.
Mais la fourbure n'est pas une fatalité : la prévention est primordiale dans cette pathologie complexe, autour de laquelle circulent de nombreuses idées reçues. Faisons le point.

Les lésions occasionnées par la fourbure sont particulièrement douloureuses et invalidantes pour le cheval. Cette affection doit être considérée comme une urgence médicale et traitée comme telle. Elle nécessite un traitement de longue durée. Ses conséquences peuvent compromettre la carrière sportive d'un cheval ou même parfois la vie des animaux les plus sévèrement atteints. La fourbure est d'ailleurs souvent citée comme deuxième cause de mortalité dans l'espèce équine, juste derrière les coliques. Il convient donc de déceler rapidement la fourbure et de la prendre en charge de manière adéquate. En effet, la rapidité des soins favorise le pronostic. Mais la fourbure a, hélas, souvent déjà progressé au moment où les premiers signes cliniques sont détectés. Par conséquent, il est essentiel de connaître les facteurs de risque de cette maladie, afin d'adopter les mesures préventives appropriées.

Parmi celles-ci, l'alimentation joue un rôle capital. Les erreurs alimentaires sont en effet responsables de plus de la moitié des cas de fourbure, particulièrement en prairie. Attention, l'herbe de printemps est un facteur de risque important et cette période de l'année mérite donc toute notre attention.

Les mécanismes de la fourbure sont complexes

La fourbure est une inflammation du pododerme (d'où la dénomination " pododermite aseptique diffuse " parfois utilisée). Elle se produit lorsqu'il y désagrégement entre le feuillet du kéraphylle et celui du podophylle. Le kéraphylle est le tissu recouvrant la face interne du sabot, tandis que le podophylle entoure les structures internes du sabot (3ème phalange, tendons, ligaments,…). Ces deux structures adhèrent, en principe, fortement l'une à l'autre car elles sont toutes deux composées de centaines de lamelles imbriquées, un peu comme s'il s'agissait d'un velcro. Ce dispositif assure un maintien solide entre les structures internes du pied (3èmephalange, tendons, ligaments,…). En cas de fourbure et donc de détachement entre ces feuillets, les structures internes du pied se désolidarisent de la paroi du sabot. Sous l'influence du poids du cheval et des forces de tractions, la troisième phalange, principale composante osseuse contenue dans le sabot, se déplace dans la boîte cornée. Ces déplacements sont responsables de lésions au niveau des autres tissus présents dans cette zone (des vaisseaux sanguins, par exemple). Selon les circonstances, la fourbure peut être bilatérale, le plus souvent au niveau des meReconnaître les symptômes

La maladie comporte plusieurs phases durant lesquelles les symptômes évoluent. On décrit ainsi une phase de développement, une phase aiguë et éventuellement un stade chronique.
La phase de développement de la fourbure correspond au moment où le podophylle commence à se détacher du kéraphylle. D'une durée variable selon les circonstances (de 8 à 40 heures), elle peut être totalement asymptomatique. Parfois, les chevaux présentent des symptômes diffus, de légères coliques par exemple.
Le stade aigu de la maladie est marqué par l'apparition d'une douleur au(x) pied(s), plus ou moins marquée selon la gravité. Les signes les plus marquants sont une modification des aplombs et de la démarche. Le cheval tente de soulager le membre atteint en reportant son poids sur les autres membres. Les membres antérieurs étant plus souvent touchés que les postérieurs, au repos, le cheval se tient campé du devant et sous lui du derrière. Au pas, le cheval s'appuie surtout sur les talons et son centre de gravité est déplacé vers l'arrière. Les problèmes s'amplifient sur la volte. Dans certains cas, le cheval fourbu reste couché et se relève avec difficulté. Si les quatre pieds sont atteints, le cheval ne se déplace pratiquement pas. Le pied est chaud au niveau de la couronne et de la paroi du sabot et sensible au moindre choc. Ces symptômes locaux s'accompagnent de manifestations cliniques plus générales. Le cheval peut ainsi présenter de l'hyperthermie, de la sudation, de l'agitation et de l'anorexie, un peu comme s'il s'agissait d'un début de coliques.mbres antérieurs. Elle ne touche parfois qu'un seul pied ou parfois les quatre.

On voit ici nettement la bascule de l'os du pied, qui a " repoussé " la sole. © L.Bataille
Après la phase aiguë, le cheval peut sembler totalement rétabli ou, au contraire, développer des signes cliniques témoignant du déplacement de la 3ème phalange. Ce déplacement se produit 12 à 24 H après l'apparition des premiers signes cliniques. La fourbure devient alors chronique. Le cheval présente alors des symptômes variables (douleur continue au niveau du pied, boiterie persistante, déformation du sabot,

Les facteurs de risque

La fourbure aiguë est une urgence médicale et nécessite l'intervention rapide d'un vétérinaire. En attendant son arrivée, l'objectif principal est de soulager le ou les pieds touchés afin de limiter la progression de la maladie. Concrètement, on conseille d'éviter les sols trop durs comme le béton. Il peut ainsi être bénéfique d'ajouter une couche de litière supplémentaire. Il est également essentiel d'éviter de faire marcher le cheval.

«Certaines caractéristiques anatomiques du pied, innées ou dûes à un parage inapproprié, peuvent constituer des facteurs de risque.»

Le risque de fourbure est plus élevé chez les poneys, les chevaux présentant un excès pondéral, peu actifs et/ou une mauvaise condition physique. Par ailleurs, un cheval qui a déjà été fourbu présente un risque plus grand de développer une nouvelle fois cette maladie. Soumettre brutalement un cheval peu entraîné à un exercice intense augmente également le risque de fourbure, de même qu'un effort effectué sur une surface dure à grande vitesse. Enfin, certaines caractéristiques anatomiques du pied, qu'elles soient innées ou induites par un parage inapproprié, interviennent comme facteurs de contribution.

Deux mécanismes généraux peuvent provoquer l'apparition de fourbure. Celle-ci peut être locale ou mécanique et intervenir du fait d'une douleur importante au niveau d'un autre membre (par exemple, à la suite d'une fracture). Le membre opposé est alors soumis à une charge excessive, ce qui, à terme, peut mener au détachement précédemment décrit. Mais la fourbure constitue souvent une manifestation locale d'une pathologie plus générale. Elle est alors secondaire à une autre maladie qui provoque une endotoxémie (c'est-à-dire la présence de toxines dans le sang). Les mécanismes permettant d'expliquer l'apparition de fourbure dans ces circonstances sont complexes et encore mal connus. Les théories les plus récentes plaident néanmoins pour un mécanisme de perturbation au niveau vasculaire associé à l'exacerbation de l'activité de certaines enzymes, les métallo-protéinases (les MMP). Ces dernières sont responsables de la destruction du dispositif d'attache des lamelles.

«La fourbure peut être dûe à des causes alimentaires, mais aussi à des mécanismes généraux.»

Les maladies qui peuvent se compliquer d'une fourbure sont nombreuses. Certaines d'entre elles sont capables, à elles seules de provoquer son déclenchement. Dans d'autres cas, la fourbure est induite par une combinaison de plusieurs facteurs, insuffisants, à eux seuls, mais dont l'accumulation finit par provoquer l'apparition de la maladie. Parfois, l'origine de la fourbure est inconnue. Les maladies qui se compliquent le plus souvent de fourbure sont les coliques, les métrites et la non-délivrance des enveloppes fœtales après le part. Néanmoins, toute autre maladie qui implique une endotoxémie est susceptible de provoquer l'apparition de fourbure.

Le trèfle incarnat, une légumineuse très riche en azote, dont la présence en excès dans les pâtures peut constituer un facteur de risque de fourbure. © L.Bataille
La fourbure peut également intervenir à la suite d'une intoxication (au sélénium ou à certaines plantes, par exemple) ou à l'utilisation de quantités excessives de certains médicaments (surtout les corticostéroïdes). Elle peut également avoir une origine métabolique. Les chevaux, ou plus souvent les poneys, atteints d'un syndrome de Cushing présentent ainsi un risque plus grand d'être atteints de fourbure.

Gare aux excès alimentaires

Les facteurs alimentaires sont responsables de plus de la moitié des cas de fourbure. De plus, s'il est difficile, voire impossible, d'agir sur certains facteurs de risque précédemment décrits, l'alimentation est, quant à elle, aisément modifiable. Outre les intoxications, les causes alimentaires qui peuvent mener à l'apparition de fourbure peuvent être réparties en deux catégories. Les excès alimentaires chroniques sont responsables d'obésité, qui prédispose à la fourbure. La deuxième catégorie comprend les excès brutaux d'apport en hydrates de carbone non-structuraux. Ces derniers sont représentés par l'amidon et les sucres solubles contenus dans les différents aliments. Ils sont soit rapidement digérés dans l'intestin grêle et/ou fermentés par les micro-organismes présents dans le gros intestin des chevaux. Contrairement aux hydrates de carbone structuraux (cellulose, lignine,…), qui, comme leur nom l'indique, assurent le support de la plante, les hydrates de carbone non-structuraux sont utilisés par la plante comme source d'énergie pour sa croissance et sa reproduction. Les céréales (et donc les aliments concentrés) contiennent de grandes quantités d'amidon et des sucres solubles. La mélasse, les carottes et certaines pierres à lécher renferment des teneurs importantes en sucres solubles. De manière générale, tous les aliments qui présentent un goût sucré contiennent des sucres solubles. Le scénario classique de fourbure induite par un excès de céréales est celui du cheval qui a accidentellement accès à la réserve de céréales ou d'aliments composés et qui en ingère rapidement une quantité importante. Ce problème peut se produire avec n'importe quel aliment concentré, peu importe sa présentation et les céréales qu'il contient. Le pain et d'autres produits boulangers, les pommes et d'autres fruits sucrés peuvent également être impliqués dans ce type d'accident, mais plus rarement.

La fourbure de prairie : gare aux idées reçues
Le trèfle incarnat, une légumineuse très riche en azote, dont la présence en excès dans les pâtures peut constituer un facteur de risque de fourbure. © L.Bataille
La fourbure peut également intervenir à la suite d'une intoxication (au sélénium ou à certaines plantes, par exemple) ou à l'utilisation de quantités excessives de certains médicaments (surtout les corticostéroïdes). Elle peut également avoir une origine métabolique. Les chevaux, ou plus souvent les poneys, atteints d'un syndrome de Cushing présentent ainsi un risque plus grand d'être atteints de fourbure.

Gare aux excès alimentaires

Les facteurs alimentaires sont responsables de plus de la moitié des cas de fourbure. De plus, s'il est difficile, voire impossible, d'agir sur certains facteurs de risque précédemment décrits, l'alimentation est, quant à elle, aisément modifiable. Outre les intoxications, les causes alimentaires qui peuvent mener à l'apparition de fourbure peuvent être réparties en deux catégories. Les excès alimentaires chroniques sont responsables d'obésité, qui prédispose à la fourbure. La deuxième catégorie comprend les excès brutaux d'apport en hydrates de carbone non-structuraux. Ces derniers sont représentés par l'amidon et les sucres solubles contenus dans les différents aliments. Ils sont soit rapidement digérés dans l'intestin grêle et/ou fermentés par les micro-organismes présents dans le gros intestin des chevaux. Contrairement aux hydrates de carbone structuraux (cellulose, lignine,…), qui, comme leur nom l'indique, assurent le support de la plante, les hydrates de carbone non-structuraux sont utilisés par la plante comme source d'énergie pour sa croissance et sa reproduction. Les céréales (et donc les aliments concentrés) contiennent de grandes quantités d'amidon et des sucres solubles. La mélasse, les carottes et certaines pierres à lécher renferment des teneurs importantes en sucres solubles. De manière générale, tous les aliments qui présentent un goût sucré contiennent des sucres solubles. Le scénario classique de fourbure induite par un excès de céréales est celui du cheval qui a accidentellement accès à la réserve de céréales ou d'aliments composés et qui en ingère rapidement une quantité importante. Ce problème peut se produire avec n'importe quel aliment concentré, peu importe sa présentation et les céréales qu'il contient. Le pain et d'autres produits boulangers, les pommes et d'autres fruits sucrés peuvent également être impliqués dans ce type d'accident, mais plus rarement.

La fourbure de prairie : gare aux idées reçues

Près de 50% des cas de fourbure se produisent en prairie. L'herbe peut en effet contenir de grandes quantités d'hydrates de carbone non-structuraux de différents types. Parmi, ceux-ci, les fructanes jouent un rôle prépondérant dans le déclenchement de la fourbure.
L'herbe " luxuriante " est souvent considérée comme LA responsable des fourbures de prairie, en faisant généralement référence à une herbe bien verte, vigoureuse et riche en eau. Pourtant, il ne s'agit pas là des seules circonstances à risque, bien au contraire. La teneur en fructanes varie en effet selon l'espèce végétale, le stade de maturation et les conditions de croissance de la plante (composition du sol, pluie, température, degré d'ensoleillement,…) La teneur de la plante en fructanes augmente dans toutes les circonstances où son taux de production (déterminé par l'importance de la photosynthèse) est supérieur à son taux d'utilisation (par exemple, pour la croissance ou la germination). En pratique, on peut évaluer le risque que présente une pâture sur base des éléments suivants.

Etre vigilant durant toute la saison de pâturage

Le contenu en fructanes est généralement plus élevé durant les périodes de croissance de la plante, et donc surtout au printemps et en début d'été. Mais attention, des phases de croissance de la plante ont également lieu à d'autres moments de l'année, dès que le degré d'humidité du sol, l'ensoleillement et la température sont suffisants que pour stimuler la photosynthèse. Dans certaines régions, on rencontre d'ailleurs autant de cas de fourbure de prairie ou même davantage en automne qu'au printemps. En effet, de nombreux propriétaires sont bien conscients du risque de fourbure au printemps mais ont malheureusement tendance à être moins vigilants quand ils estiment, à tort, que la période critique est passée. De la même manière, tout épisode de croissance de l'herbe après une période de sécheresse doit être considérée comme potentiellement dangereuse, quelle que soit la période de l'année. En cas de stress (par exemple, en cas de chute de température), la croissance de la plante peut être inhibée. Dans ces circonstances, les fructanes sont moins utilisés et s'accumulent dans la plante. C'est pourquoi on rencontre également des cas de fourbure en fin d'automne ou même en hiver, quand le degré d'ensoleillement est suffisant que pour stimuler la production de fructanes.

Préférer le pâturage nocturne et matinal

En général, le contenu en fructanes est plus élevé la journée que pendant la nuit et les premières heures de la matinée. En effet, la photosynthèse, et donc la production de fructanes a lieu durant la journée, tandis que la plante les utilise majoritairement la nuit, pour sa croissance.

 On conseille donc de faire pâturer les animaux prédisposés très tôt le matin ou durant la nuit. C'est surtout vrai durant les journées chaudes et ensoleillées. Par temps pluvieux ou plus froid, ce n'est pas nécessairement le cas.

Eviter le surpâturage

De manière générale, l'herbe qui a déjà fleuri et monté en graines présente des taux de fructanes plus bas. Attention cependant, durant la floraison, l'herbe présente des taux de fructanes élevés. Le contenu en fructanes est généralement plus élevé dans la tige que dans les feuilles de la plante, particulièrement dans le bas de la tige. Il convient donc d'éviter le surpâturage. Concrètement, l'idéal est de supprimer temporairement l'accès à une prairie quand l'herbe mesure moins de 10 centimètres.

Privilégier les prairies naturelles

En général, les prairies naturelles, qui contiennent de nombreuses variétés d'herbe, sont plus sûres que les prairies artificielles, majoritairement composées de variétés sélectionnées pour leur croissance, ou les monocultures.

Fertiliser…mais pas trop

Un apport raisonné (en quantités adéquates et au moment opportun) en fertilisants est préférable à un usage abusif de ceux-ci. En revanche, l'absence totale d'éléments fertilisants est associée à une augmentation des teneurs en fructanes.

 

Cet article est publié avec l'autorisation de son auteur, le Vétérinaire Agathe Delobel.

 

 

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